Compagnie Prana

Mala - temps de recherche - photo de Jeanne Paturel

Note d’intention

MÂLÂ

English Version

Par delà les infortunes récurrentes du monde,
l’art, pour moi, demeure un moteur essentiel.
Quelque chose qui ne peut être détruit.
Une transmission à réinventer sans fin, génératrice d’enthousiasme.
Cette nouvelle pièce chorégraphique multiplie les déclinaisons.
Un peintre dans sa recherche esquisse des paysages temporels.
Un poète tente un dialogue imprévisible entre Moïse et Shiva.
Autant d’approches pour habiter le temps autrement.

En 1987, alors que je posais mon premier pas sur la terre indienne et avant de me plonger entièrement dans la culture keralaise, j’ai visité à Cochin la synagogue, parallèlement à bien des temples. Plus tard, en 2018, j’ai rencontré Elias Josephai, l’étonnant gardien d’une autre ancienne synagogue de cette même ville.

De là est né tout un questionnement sur le signe, le langage, la transmission, les migrations d’un peuple vers un autre pays. Qu’est ce qui est gardé de l’ancien, qu’est ce qui est adopté du nouveau, qu’advient-il de ces confluences ?

De là se construit cette création Mala où je tisse un lien entre mes propres origines et la grande Inde mythique des voyageurs, celle où j’ai été pour apprendre et pratiquer des gestes ancestraux.

En Inde, la Mala est un collier de perles précieuses, ou une guirlande. Elle orne la mariée, les divinités hindoues, la danseuse, elle est le chapelet du moine. Elle est bénéfique et structurante. Elle rassemble des fleurs, des pierreries, du bois, de l’or ou de l’argent. Au centre de chaque mala, passe le fil. Elle se dépose, se retourne, se torsade, peut se casser, se réparer, se renfile. Chaque mala a une histoire…

Cette création qui porte son nom puise son inspiration dans une traversée mémorielle, de savoir-faire et d’imaginaires. C’est aussi le nom d’un lieu au Kerala, dérivé de l’hébreu Ma’alaha.

C’est ainsi que je trouve dans ces mots réunis, des valeurs essentielles, en écho à ma recherche artistique. Une manière de donner coeur aux époques, joies et épreuves que traversent nos vies.

Dépassant les limites du contemporain et du traditionnel, Mala est une fable philosophique, chorégraphique et poétique, une ouverture sur le transnational. La création se construit pas à pas, nourrie de ma mémoire interne et de la danse, d’hybridations, croisement de questionnements, vecteurs de connaissances, d’expressions et de survivances.

Brigitte Chataignier

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